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Mémoires d'un artilleur
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3 mai 2010

Prêtre et poète.

Lundi 21 septembre. C.P.  Cher Papa, chère Maman, ma lettre du Dimanche se réduit à cette carte car je n'ai pas le temps de vous écrire aujourd'hui Lundi plus longuement et hier, je n'ai pas eu une minute. Je suis allé passer la journée de Dimanche à Niklasdorf, un petit bled situé à 75 kilomètres de Rottenmann, entre Leoben et Brück. C'est le Cercle Catholique du camp qui m'avait envoyé là comme délégué parce que le responsable et l'assistant étaient empêchés d'y aller, l'un par le travail, l'autre par la maladie. Je suis donc parti par le train de 5h. Là-bas, j'ai trouvé sur le quai de la gare des français d'un peu tous les coins de la Styrie, venus là pour la réunion mensuelle, pour dire ce qu'ils ont fait et prendre des résolutions pour le mois à venir. Je suis parti avec un petit groupe et le reste de la troupe nous a rejoints plus tard. Tout cela était organisé par l'abbé Vuaillat qui était venu à Rottenmann le 8 août. Avant de partir en excursion, on a cassé la croûte pour prendre des forces et on est monté, 16 types dont deux aumôniers, sur une petite montagne d'où on a eu, en sortant du brouillard, une belle vue sur la vallée de la Mur. On est arrivé en haut vers 11h 1/2. On a d'abord fait une petite méditation. Puis on a dressé un autel sur lequel nous avons eu une Messe de communion à midi et demie. Après cela, déjeuner avec les provisions que tous avaient apportées, mises en commun et partagées. Ensuite on a chanté,, pendant que deux types étaient descendus à une ferme chercher de l'eau pour boire. Ensuite réunion, où l'on a, après un commentaire d'Evangile, dit ce que l'on avait fait dans chaque camp, le mois écoulé. Discussion sur l'organisation de loisirs d'hiver. Et puis ensuite il a fallu songer à redescendre, et rapidement même, car il était 4h 1/2 et les trains vers Brück ou vers Leoben étaient vers 6h. 


[1] M. le Chanoine Jean Vuaillat. Né le 17 avril 1915 à Lyon, dans le quartier de la Croix-Rousse, aîné de sept enfants, ordonné prêtre le 20 décembre 1940, il est nommé Vicaire à Givors, puis à St Pierre de Vaise à Lyon. Sur la demande du Cardinal Gerlier, en 1943, il part en Allemagne pour assurer un ministère auprès des jeunes du S.T.O. À son retour en 1945, il devient Directeur de l’École cléricale de Fourvière et Maître de Chapelle à la Basilique. En 1982, il est promu Chanoine Titulaire au Chapitre de la Primatiale St Jean à Lyon, où il anime les célébrations. Il est aussi un poète : en 1942 parait une première plaquette, "Résonances", et en 1946 son premier ouvrage, "D’Ombre et de Soleil". Il recevra de nombreux prix, et publiera au moins 27 recueils de poésies et huit ouvrages de prose, en général des biographies. En 1966, il fonde Laudes, d’abord revue de Poésie Chrétienne, puis d’inspiration chrétienne, qui paraît tous les trimestres jusqu'en 2006. Bibliophile passionné et très éclectique, collectionneur d’autographes, il a regroupé de nombreux ouvrages et documents. Il est décédé le 5 mai 2009.

Poème publié dans "D'ombre et de soleil".

Litanies de l'usine.

Soyez loué, Seigneur, par la terre et la mer

Et par tout ce qui fait chanter votre domaine,

Mais aussi par l'effort de l'homme et de sa peine,

Par ceux dont le travail est un breuvage amer.

Par les hommes qui vont chaque matin, sans bruit,

Vers le même labeur et la même machine,

Par le troupeau passant la porte de l'usine

Où la lampe crûment ronge un morceau de nuit.

Par la sirène inconsolable où chaque jour

Pleure tout le désir de ceux que l'on relève,

Et par la cheminée de briques qui s'élève

Comme un grand doigt dressé vers un ciel sans amour.

Par le mur sans fenêtre et le toit sans couleur,

La cour où le pavé lutte avec l'herbe rare,

Et le ciel vert de gris dont la lumière avare

Est lasse de pleuvoir sur la même laideur.

Mais pour ce chant d'oiseau sur le poteau noirci,

Et cette touffe d'herbe au coin de la gouttière,

Et ce petit lambeau de ciel bleu qui s'éclaire,

Seigneur, soyez loué, Seigneur, soyez béni !

                                          Niklasdorf, 1944.

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